Deirdre Cherchève

26 Jan 2014 | Portraits | 8 commentaires

Deirdre était la femme de mon parrain, Frédéric Cherchève. Je ne l’ai vue que deux ou trois fois dans ma vie mais une fiche lui revient, car elle est à l’origine de l’une des expériences sensorielles les plus fortes de mon existence.

Je ne sais pas vraiment quel âge j’avais, probablement 4 ou 5. Je ne sais pas où nous étions ni où nous allions, avec mes parents, dans cette voiture qui roulait la nuit.

Ce que je sais c’est qu’on s’est arrêtés devant une maison, au milieu de la forêt, qu’on est entrés chez des gens que je ne connaissais pas très bien, qu’on m’a expliqué que le monsieur était mon parrain.

Deirdre m’a installé à un coin de table et m’a demandé si je voulais du hachis parmentier. J’ai répondu non, car je ne savais pas ce qui se cachait derrière ce nom compliqué. Je me souviens que c’est ma mère qui m’a expliqué : c’est de la purée avec de la viande hachée.

J’ai dit oui. Deirdre m’a servi du hachis dans une assiette creuse en plastique bleu et blanche. J’ai goûté, et c’est là qu’a commencé l’expérience mystique. Je me suis senti transporté dans une autre dimension. J’ai terminé mon assiette, en ai demandé une autre, puis encore une autre. Je ne parvenais plus à m’arrêter.

Aujourd’hui encore je suis capable de sentir le goût exact du hachis parmentier de Durdrey. Le hachis parmentier est devenu l’une de mes spécialités et j’adore le mien, mais il n’aura jamais le je-ne-sais-quoi de celui que j’ai goûté ce soir-là.

Mes parents et les Cherchève ne se voyaient pas souvent. Ce n’est que vers la fin des années 90 que j’ai revu Deirdre. Un dimanche, à déjeuner dans leur maison de Rambouillet. On lui avait raconté l’histoire du hachis parmentier dont elle ne se souvenait pas.

Ma mère, qui est en contact régulier avec Frédéric, m’a appris que Deirdre est décédée il y a quelque temps.

29 août 2014 : j’ai modifié cette fiche pour corriger l’orthographe du prénom de Deirdre, que j’écrivais Durdrey (comme ça se prononce…)