La maison du Bois-Vert

17 Jan 2014 | Réflexions | 0 commentaires

Ca fait deux fois qu’on me demande quelle est la maison qui sert de couverture à ce blog.

Il s’agit de ma maison du Bois-Vert, dans laquelle j’ai passé les premières années de ma vie.

Avant que j’y habite, cette maison avait un statut mystérieux à mes yeux : mon grand-père avait acheté le Bois-Vert, y avait réalisé un lotissement, d’une dizaine de parcelles où vivaient désormais tous mes voisins. Il avait gardé le bout de la rue, y avait construit l’écurie, un tennis, un mini-golf, et un lavoir qui servait de piscine. 

Avant ma naissance, cet endroit était une sorte de « club gratuit » où chacun pouvait venir jouer au tennis et au mini-golf, faire un peu de cheval, se baigner dans le lavoir. J’ai entendu beaucoup de gens parler de cette époque comme d’un âge d’or. Chaque été il y avait des tournois, et plein de monde y participait.

Dans mon enfance, il restait des traces de cette époque : dans le jardin, les vestiges du mini-golf, peu à peu gagnés par l’herbe et qui me servaient d’obstacles dans mes jeux. Et puis le tennis, pas très entretenu mais où j’ai appris à jouer, et où plein de gens venaient pendant les vacances. L’été, à partir de 17 heures, les enfants étaient priés de laisser la place aux adultes. Il y avait toujours une quinzaine de personnes qui se retrouvaient, qui jouaient. Ma mère détestait ça. Elle se sentait envahie. Je ne comprenais pas pourquoi; je ne me lassais pas de ce défilé de gens connus ou inconnus.

Cette maison était donc mise à disposition de mes parents par mon grand-père. Par la suite, mes parents ont acheté et aménagé une ferme, à deux kilomètres de Pompadour, où nous nous sommes installés. Nous vivions déjà à Limoges, puis à Paris. Je n’ai jamais vécu à plein temps dans cette seconde maison, d’Ecupillac.

Même si la maison du Bois-Vert avait disparu à cette époque-là, elle resterait à jamais ma maison. Mais elle n’est pas sortie de ma vie. Elle a continué à faire partie de mon histoire.

Cette maison appartenait à mes grands-parents. Ils l’avaient mise à la disposition de mes parents quand ils se sont installés, puis après notre déménagement ils l’ont louée pendant quelques années, avant de s’y installer à leur tour, lorsque mon grand-père a pris sa retrait. Pour une raison que personne n’a jamais compris il a tenu à laisser sa maison à mon oncle, qui lui succédait en tant que notaire à Pompadour.

Ma grand-mère, la personne que j’ai le plus aimé, a donc vécu dans ma maison, la maison que j’ai le plus aimé. Ma chambre d’enfant est devenue le bureau de mon grand-père.

Il avait placardé sur la porte un petit mot rappelant que cette pièce avait été ma chambre.

Dea années plus tard, après le décès de mes grands-parents, la maison a été utilisée par Notariat Services, l’entreprise familiale. C’est devenu « la villa » : quelques bureaux, une salle de réunion. Seul le bureau de mon grand-père, fondateur de la société, restait intact.

Mon oncle Jean-Luc, qui travaille chez Notariat Services, l’a occupé un moment. Il habite à 50 mètres de la maison du Bois-Vert, dans une maison qu’il a construite à l’emplacement de l’écurie où j’allais chaque matin voir Marcel Marsac s’occuper des chevaux. Le tennis est devenu un parking, c’est là qu’on se gare lorsqu’on va dîner chez Jean-Luc.

Moi-même, j’ ai passé quelques mois dans ce bureau, il y a 5 ou 6 ans, à une période où je réalisais une mission de conseil pour la société.

Bref, encore aujourd’hui, si on n’est pas de la famille, on n’utilise pas ma chambre.

Le bâtiment principal de Notariat Services a été construit dans les années 70, dans le pré au bout de la rue du Bois-Vert, à la place du pré où se trouvaient les chênes centenaires, près de l’étang. Je passe donc devant mon ancienne maison à chaque fois que je m’y rends, et aussi à chaque fois que je vais dîner chez mon oncle.

Je suppose que le mot de mon grand-père sur la porte de ma chambre s’y trouve toujours.

Voilà. Fallait pas me poser la question.