Comme son nom l’indique, Madame Bureau est la femme de monsieur Bureau.
Comme lui, elle était institutrice à Pompadour lorsque je fréquentais l’école. Je me souviens précisément de son image à cette époque.
Je rêvais d’être l’élève de monsieur Bureau, mais son épouse ne me faisait pas la même impression. Elle me semblait trop sévère.
Plus tard, j’ai appris qu’elle avait la réputation d’être une emmerdeuse qui empoisonnait la vie de son mari. Le genre de réputation qu’on acquiert facilement, à Pompadour.
Elle était effacée, très accueillante les fois où j’ai dîné chez elle avec mon père.
Je crois l’avoir toujours vue avec son mari. Sauf après le décès de celui-ci.
Veuve, elle se promenait tous les jours sur la route, comme elle le faisait auparavant avec lui. Mais au lieu de regarder la nature, elle avançait d’un air hagard, avec un regard fixe. Elle avait l’air totalement perdue.
J’ai failli l’écraser un soir, elle sortait du brouillard, marchant au milieu de la route. Un autre jour, peu après je me suis arrêté pour lui dire bonjour mais elle a continué son chemin sans me regarder.
Etait-ce la douleur de vivre sans son mari ? Le début d’une maladie ? Je n’en sais rien. Pendant longtemps madame Bureau a hanté la route de l’Aumérigie. Puis plus rien. Cela fait un ou deux ans que je ne l’ai pas vue. Je me demande si elle est encore en vie.