Lors de mon premier jour au collège Stanislas, j’étais un peu perdu. Je débarquais de Limoges, les gens me disaient que j’avais « l’accent de Marseille », et j’étais parmi les plus petits de ma classe.
La première personne qui m’ait paru sympathique dans cet univers hostile, c’est Marc Cambourakis. Sans doute à cause de son aspect posé et d’une certaine élégance. Et sans doute aussi à cause d’un point commun : il vivait, comme moi, boulevard Raspail. Lui, au 97. Moi, au 84.
Le premier soir, en sortant, on a fait ensemble le chemin de retour de l’école. Ses parents tenaient une boutique de fourrure, presque en face de chez moi. On s’est séparés au coin de la rue de Fleurus et du boulevard Raspail, à moins de 100 mètres du collège. Il lui restait à traverser le boulevard, il me restait à suivre le trottoir jusqu’à la porte de mon immeuble.
Marc n’est jamais devenu un ami proche, mais on a longtemps été dans la même classe, on a joué au foot des centaines de fois. C’était un attaquant, il dribblait très bien, mais, comme moi, oubliait de faire des passes. On s’est suivis, parfois dans la même classe, parfois dans des classes voisines, pendant des années.
Je ne suis jamais entré dans la boutique de ses parents.